Fête des voisins : hypocrites à tous les étages

Le 23 mai, la fête des voisins a encore servi de vitrine à une entente factice. Décryptage au vitriol d’un rituel aussi faux que gênant.

Fête des voisins : le grand bal de l'hypocrisie ordinaire

Ah, la fête des voisins. Ce grand moment de fraternité en plastique, sponsorisé par le ministère du bon voisinage et de la fausse bonne humeur. Le 23 mai, comme chaque année, les balcons se sont décorés de guirlandes achetées chez Gifi, les plateaux de chips ont remplacé les regards en coin, et les voisins se sont offert deux heures de cordialité forcée entre deux rancunes tenaces. Fête des voisins : le grand bal de l'hypocrisie ordinaire

On aurait presque cru à un miracle collectif : Patrick du troisième souriait à Chantal qu’il traite de "pouffe aux chats" le reste de l’année, Martine a même apporté une quiche à la mimolette à la coloc bruyante qu’elle rêve d’étrangler chaque samedi soir. Et que dire de Jean-Michel qui, pour une fois, n’a pas menacé d’appeler la police quand les enfants du rez-de-chaussée jouaient dans le hall. Un vrai festival d’hypocrisie parfumée au rosé tiède.

La fête des voisins, c’est cette soirée où l’on fait semblant. Semblant de ne pas se souvenir de la dénonciation anonyme au syndic. Semblant de ne pas entendre la perceuse du dimanche matin. Semblant de partager un "vivre ensemble" qu’on piétine joyeusement les 364 autres jours de l’année.

Ce théâtre de la bonne entente ne dupe plus personne. Derrière chaque sourire figé, un grief. Derrière chaque toast levé, un "je t’emmerde" en attente de livraison. Et pourtant, chaque année, on recommence. Parce que c’est convivial. Parce que c’est bien vu. Parce qu’on a peur d’être celui qui ne viendra pas.

Et si, pour une fois, on se disait vraiment les choses ? Si on profitait de cette fête pour vider son sac, balancer les dossiers, dire à Béatrice qu’elle ferait mieux d’apprendre à trier ses poubelles et à Gérard qu’on ne veut plus entendre sa télé jusqu’à 2h du matin ? Non, bien sûr que non. Ce serait déplacé. Ce serait… honnête.

Alors on grignote, on trinque, on se promet de se revoir – et le lendemain, tout recommence. Les claquements de portes, les regards fuyants dans l’ascenseur, les lettres passives-agressives sur le panneau de l’entrée.

Vivement l’année prochaine. Ou pas.

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